Ce qu'il faisait bon d'arpenter les ruelles enneigées du bourg. Les rafales de vent au caractère de chipie qui s'amusaient à décoiffer les épis cirés, à soulever les jupons frêles. Ce que Lada aimait le plus par ce temps, c'était la sensation piquante de l'air froid qui profitaient d'une inspiration profonde pour glacer les parois intérieures. Elle lui donnait l'impression de se renouveler, d'inviter son enveloppe corporelle à se montrer résistant mais suffisamment peu pour laisser l'air réparateur s'occuper du reste. Un véritable bonheur pour celle qui s'arrêtait tous les deux pas pour humer l'air, manquant chaque fois de rentrer dans un badaud qui ne manquait que très rarement de s'énerver de son égoïsme. Un sourire illuminait alors son visage si doux tandis qu'elle s'excusait et instillait, imperceptiblement, un peu de joie dans les âmes ronchonnes. Et chaque fois Lada se promettait de se montrer plus au fait de la réalité. Pour chaque fois mieux recommencer à nouveau.
Si la charmante déesse se montrait tout à fait honnête, elle avouerait que ce n'est en réalité que la deuxième qualité de ce temps qui habitait la Transylvanie depuis plusieurs semaines. Outre les jeux de neige dont elle ne se lassait jamais, l'attrait pour ce temps avait quelque chose à voir avec l'impossibilité pour les humains d'atteindre la région. Et elle n'était pas la seule à penser ainsi, c'était à voir les teintes écarlates des locaux. Ils ne pouvaient que se montrer ravis de ne pas avoir à côtoyer les êtres inférieurs dont on les disait pourtant de même race : les touristes. Qu'il était bon de papoter sans craindre oreilles curieuses et malintentionnées. Mains baladeuses avides de mystères par tâtonnement. Aussi le panier qui se balançait dangereusement dans sa main droite contenait tout ce qui était nécessaire à une bonne soupe fumante de vapeur, De quoi réchauffer les corps, là où les esprits se suffisent à eux mêmes. Lada de délectait dors et déjà du bon repas qu'elle partagerait bientôt avec quelques-unes de ses Soeurs, tout en profitant de la fraîcheur matinale qui teintait sans cesse davantage son minois d'une bonne mine enfantine. L'humeur au zénith, la déesse ne réfréna pas la joie quand un visage connu se présenta à elle. Yasen. Ce très cher Yasen dont elle aimait tant la compagnie quoique son absence reflétait bien plus ces derniers temps que sa félinité. La déesse le salua d'un signe de tête, incapable de relaxer sa mâchoire rancunière. Celle qui s'était engagée à ne pas montrer le manque ressenti par le silence du métamorphe se trouva bien incapable de réaliser sa promesse. Ne se défaisant pas du sourire qui lui était caractéristique, ses lèvres quant à elles se pincèrent lorsque leurs interlocuteur releva le temps qui s'était écoulé depuis leur dernières visites. C'est qu'elle trouvait culotté de se présenter ainsi sans présenter ses excuses. Car, elle en était certaine, c'était de sa faute à lui si leurs chemins ne s'étaient pas croisés dernièrement. Quelque chose (ou quelqu'un) occupait tout son temps et cela ne plaisait guère à la jalousie adolescente qui pointait  déjà au plus profond de l'enveloppe charnelle adolescente. 

- Bonjour Yasen. Je me porte très bien, merci de votre préoccupation.

Mentit-elle l'air volontairement froid. Un mensonge plutôt évident, car Yasen devait probablement soupçonner le malaise créé par l'actualité du coin. Nul n'ignorait le Bal de Noël qui se préparait et la désagréable surprise du Saigneur. Mais il ne serait pas aussi simple pour Yasen de se faire pardonner. C'est pourquoi elle ne lui retourna pas la question.

- Effectivement, cela fait bien longtemps que nous ne vous voyons plus par ici... Le regard empli de sous-entendus, elle s'aventura à ajouter. Dites-moi dont ce qui est si distrayant que vous ne sortez plus de votre cachette.